Un toit sur la merAvignon 2025
Un moment fort et sensible, sincère et poétique, porté par des interprètes remarquables.
Spectatif
Brigitte Faure et Yvan Balandras ont complicité évidente dans une pièce joliment indocile.
Zebuline
Intense et bouleversant, une pépite théâtrale qui évite tous les pièges du genre pour nous offrir un moment de pure émotion.
RMT News
création Avignon 2025
par les créateurs de "Les Filles aux mains jaunes"
Cette nuit-là, Kid vient se réfugier sur ce toit d’immeuble, en surplomb de la mer. Il a une vingtaine d’années et n’en finit pas d’être en colère. Il fuit une destinée toute tracée.
Il ne s’attend pas à rencontrer Bonnie. La soixantaine rugueuse, revêche à tout parce que la vie n’a pas arrêté de se rebeller contre elle.
Entre les deux, méfiance, poids des préjugés, incompréhension. C’est un télescopage improbable, une rencontre choc. Une de celles qui transforment et bouleversent nos vies.
Cette nuit de printemps va se révéler propice aux confidences, à la libération des secrets et prendre une dimension imprévisible et magique.
Kid au souffle malade et Bonnie au cœur déchiré vont construire tous les deux un rêve de liberté, joyeux et émouvant, émancipateur et plein d’espoir.
de Michel Bellier (Éditions Lansman)
mise en scène
Joëlle Cattino
avec
Brigitte Faure et Yvan Balandras
costumes Virginie Breger
lumière et musique Paolo Cafiero
scénographie Jean-Marc Lauren
production Dynamo Théâtre
Spectatif
Un huis clos, la nuit. Deux vies qui n’ont rien à faire ensemble se confrontent sur le toit d'un bâtiment avec vue sur la mer. Une fiction traitée avec un onirisme réaliste parfumé de petites touches de poésie.
Un improbable croisement de chemins entre Bonnie, qui a développé des routines solides pour faire face à la lourdeur d'une existence qui ne lui a rien épargné, et Kid, un jeune homme timide dont la vie ne tient qu'à un fil, qui, lorsqu'il est incapable de s'exprimer, se met à danser...
L’auteur Michel Bellier dépasse la simple narration d’une rencontre pleine de richesse entre deux générations, deux solitudes, deux cris jetés vers le ciel. Derrière la peinture de ces deux êtres errants sur un toit, il pose un regard sur le passage du temps, les décisions de vie et l'aptitude à transformer son destin.
La symbolique du toit, fragile abri au-dessus de l'horizon infini de la mer, renvoie à la fois à une quête de sécurité et une plongée dans l’incertitude. Bellier façonne une approche sensible et précise des personnages et des situations pour donner vie à un récit qui oscille entre réalité et rêve, entre intimité et universalité. Un récit qui nous invite à la réflexion sur les notions de solitude et d’espoir.
Comment le spectacle se conclura-t-il : échappée audacieuse ou passage à l'acte désespéré ? Tout le long, nous resterons suspendus à une attente de résolution, quelle qu’elle soit.
La mise en scène de Joëlle Cattino laisse toute la place au texte. Les émotions des personnages filent vers nous avec délicatesse ou éclat selon les scènes. Les transitions entre les séquences dansées et jouées sont fluides et sans ambages. Il se dégage de la mise en place une atmosphère intime dans un univers visuel à la fois épuré et évocateur, transportant le spectateur dans un espace où toit et refuge se confondent.
Et puis il y a les comédiens. Quels comédiens ! Leur jeu est fait de sincérité et de profondeur. Leur complicité sur scène établit une connexion immédiate avec le public, rendant chaque scène authentique et touchante. Yvan Balandras, par ailleurs danseur virtuose, et Brigitte Faure dont nous apprécions toujours autant la délicatesse et la puissance de jeu, incarnent avec brio ce duo-duel incongru.
Un moment fort et sensible de théâtre, sincère et poétique, porté par des interprètes remarquables.
Zebuline
Un toit d'immeuble, quelque part dans une ville portuaire dont la localisation sera volontairement laissée à l'imagination.
Bonnie, femme usée par une vie cabossée, vient y chercher refuge. Elle y trouve Kid, jeune marginal.
Un toit sur la mer raconte ce tête-à-tête, joliment écrit par Michel Bellier et mis en scène par Joëlle Cattino, sa complice de toujours. Sur scène, pas de décor pesant : un muret, quelques accessoires, la lumière du soir. L'essentiel repose sur le dialogue direct, simple, parfois drôle, souvent touchant.
Brigitte Faure, habituée de rôles où l’énergie le dispute à la sensibilité, donne à Bonnie une présence brute et attachante.
Face à elle, Yvan Balandras, comédien formé à la danse, campe un Kid à la fois gouailleur et vulnérable.
Leur complicité évidente sert ce théâtre dont le moteur principal demeure la rencontre, dans une pièce joliment indocile.
RMT News
Dans ce huis clos nocturne signé Michel Bellier, deux solitudes se télescopent sur un toit d’immeuble face à la mer. Une rencontre improbable entre Bonnie, femme mûre au caractère revêche, avec des habitudes bien ancrées pour lutter contre le poids d’une vie qui ne lui a rien épargné, et Kid, jeune homme réservé en sursis qui n’a que quelques mois à vivre et qui lorsqu’il ne peut plus parler, danse…
Sur un plateau dépouillé figurant un simple toit d’immeuble avec sa ville portuaire et industrielle en toile de fond et trois éléments de décors – une chape de béton côté jardin, un chéneau dépassant de la toiture côté cours, un rebord en avant- scène- les deux comédiens, Brigitte Faure et Yvan Balandras, tissent une relation d’une rare justesse. Leur complicité grandit au fil des heures, portée par le texte ciselé de Michel Bellier où l’humour le dispute à l’émotion, magnifiée par la mise en scène de Joëlle Cattino.
Sa mise en scène emprunte au cinéma ses codes visuels – plans rapprochés sur le rebord du toit, zooms sur des détails significatifs – effets renforcés par un travail subtil des lumières avec ses filtres bleu nuit, dorés et pourpres. Du coucher du
soleil tombant sur la mer à l’aube naissante à l’horizon, elle confère une atmosphère douce et feutrée au spectacle. La bande sonore délicate, ponctuée par les signaux de départ nocturnedes supertankers, les bruits de tôle des navires et de grues, les cris des grands goélands,accompagne avec justesse les moments forts comme les instants de légèreté. Les séquences de hip-hop dansées par Kid apportent une respiration moderne à ce face-à-face intime.
Les métaphores très imagées de Bonnie, que Kid peine à comprendre, créent des moments de comédie savoureux, tandis que les connaissances astronomiques du jeune homme révèlent une sensibilité insoupçonnée. Le dialogue entre ces deux générations que tout semble opposer se construit avec finesse, sans jamais tomber dans le pathos. Le récit de sa vie par Bonnie s’enivrant, chantant et dansant sur scène avec une fougue insoupçonnée est un moment fort du spectacle. Elle se livre sans honte au jeune homme qu’elle tente de convaincre d’oser rêver et vivre ses rêves d’aventure.
Plus qu’une simple histoire de rencontre, « Un toit sur la mer » est une réflexion
profonde sur le temps qui passe, les choix de vie et notre capacité à réinventer notre destin. Le spectacle se termine sur une note d’espoir fou : leur fuite commune vers l’inconnu sur un navire au nom orientalisant -et non un bateau comme dirait Bonnie-, tel un « Bonnie and Kid » maritime qui fait un pied de nez aux conventions.
Les deux comédiens livrent une performance remarquable, tout en nuances. Brigitte Faure incarne avec force cette femme blessée qui retrouve le goût de vivre, tandis qu’Yvan Balandras compose un Kid touchant de vulnérabilité et de révolte contenue. La scène de leur baiser dans laquelle Kid demande à Bonnie s’il peut l’embrasser est à la fois émouvante et tendre.
Ce spectacle nous rappelle avec grâce que les plus belles rencontres sont souvent les plus inattendues, et que l’amour peut naître là où on ne l’attend pas. Intense et bouleversant, il explore avec finesse et poésie des thèmes universels. La performance remarquable des acteurs, la mise en scène inspirée et le texte poignant font de ce spectacle une pépite théâtrale qui évite tous les pièges du genre pour nous offrir un moment de pure émotion.
Un spectacle à ne pas manquer lors du Festival Off d’Avignon 2025.
Théâtre du Girasole à 17h30
du 5 au 26 juillet 2025
relâches 8, 15 et 22
